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DE LA NÉCESSITÉ D’UNE INDUSTRIE DU TRUST FORTE EN SUISSE

30.06.2017 - 16:32
Si l’on s’en tient aux récentes études de Cap Gemini, PWC et E&Y sur les grandes tendances qui vont marquer l’évolution de la gestion de fortune dans les prochaines années, il y en a deux qui doivent retenir toute notre attention.

La première est le transfert sans précédent des fortunes constituées par les baby boomers (nés entre 1946 et 1965) vers les générations X (nées entre 1966 et 1980) et Y ou « millennials » (nées après 1980). Cette question des transferts intergénérationnels représente une opportunité stratégique significative de croissance d’actifs sous gestion pour les banques privées et autres gestionnaires qui sont en mesure d’anticiper et d’accompagner cette transition pour leurs clients.

A contrario, l’absence d’une planification fiscale et successorale adéquate est l’une des raisons majeures de destruction de valeur, tant pour les familles que pour les établissements qui les conseillent. Lorsqu’il s’agit de planification successorale pour des grandes fortunes internationales, le recours au trust est souvent envisagé car il offre une solution à la fois robuste et flexible. Il permet de maintenir un élément de contrôle sur les avoirs la vie durant, tout en transférant en temps voulu, et de manière fiscalement attractive, la propriété des biens aux générations suivantes. En cas de transfert d’entreprise familiale, on note que les nouvelles générations d’héritiers vont, pour nombre d’entre eux, vendre ce type d’actif en vue de constituer des « family offices » dont les investissements sont généralement logés dans différentes sociétés, elles-mêmes détenues par des trusts familiaux.

La seconde tendance est la croissance rapide des actifs sous gestion en provenance d’Amérique du sud, du Moyen-Orient, d’Afrique et bien entendu d’Asie. Si l’on ajoute la Russie à cette liste, nous sommes confrontés à des régions dites « à risque » et qui font face à une instabilité géopolitique sans précédent. Cet horizon n’est pas près de s’éclaircir. Il incite les grandes fortunes qui y résident à mettre à l’abri une partie importante de leurs avoirs dans des centres financiers internationaux stables, comme la Suisse. Ces décisions sont motivées par des besoins de diversification géographique, de protection contre les risques de corruption, de kidnapping, de chantage ou de confiscation de biens à des fins politiques.

Les grandes fortunes issues de ces pays sont aujourd’hui conseillées par des avocats spécialisés à partir de Londres, New-York ou Genève. Ces derniers recourent régulièrement à des trusts car ces structures permettent non seulement une administration centralisée et efficace des avoirs, une dévolution successorale ordonnée, mais également une confidentialité accrue ainsi qu’une plus grande protection du patrimoine. Bon nombre de ces familles, évoluant dans des pays dont la sécurité est douteuse, prennent la décision de se relocaliser et leur choix se porte souvent encore sur l’Angleterre. Ces fortunes étrangères alimentent le segment de la clientèle « résidante mais non domiciliée » en Angleterre, très convoité par les banques privées.

La majorité de ces familles se structure par le biais de trusts. Toutes ces structures de trusts se doivent d’être légitimes en vertu des lois suisses anti blanchiment et en totale conformité fiscale eu égard aux exigences des programmes « FATCA » et « CRS » d’échange automatique d’informations en matière fiscale. Au vu de ce qui précède, la détention au sein des banques suisses d’actifs dont les titulaires de comptes sont, directement ou indirectement (en cas d’interposition de sociétés d’investissement), des trusts est considérable. Cette situation a vocation à perdurer, voire à s’accroître, car la demande est là.

Ces développements ont été bien compris par les places financières concurrentes de la Suisse telles que Hong Kong et Singapour, Londres et ses dépendances de la couronne (îles de Man, Jersey, Guernesey) et les territoires britanniques (îles Vierges britanniques, Caïmans, etc.). Toutes ces juridictions ont participé à l’expansion de l’industrie du trust en créant des conditions juridiques, fiscales et réglementaires favorables.

L’idée est simple : renforcer leur compétitivité et leur attractivité en intégrant au sein d’un même centre financier tous les services de gestion, de structuration et d’administration patrimoniale à haute valeur ajoutée.
En tant que leader mondial de la gestion de fortune, la place financière suisse se doit de relever les défis relatifs aux transferts intergénérationnels de sa clientèle internationale. Elle doit aussi répondre aux besoins grandissants des fortunes en provenance de pays émergents dont les objectifs sont majoritairement non fiscaux et visent à protéger leurs avoirs de manière légitime. Dans les deux cas, la nécessité d’une industrie du trust forte en Suisse nous semble une évidence.

Cela passe notamment par une meilleure réglementation de la profession. Ce processus est en cours avec l’intégration des trustees dans le projet de loi du Conseil fédéral sur les établissements financiers. Il soumet notamment les trustees à un régime d’autorisation et de surveillance prudentielle. Nous ne pouvons que nous en réjouir.

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