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Donald Trump crée-t-il vraiment des emplois à coup de tweets?

06.01.2017 - 22:37
Dans un tweet rageur, Donald Trump a menacé Toyota de représailles douanières si le fabricant japonais ne renonçait pas à la construction d'une usine au Mexique. Effet immédiat sur l'action du constructeur nippon qui a chuté à la Bourse de New York. Le fabricant a perdu pour plus d'un milliard de dollars. Quelques jours plus tôt, le président élu américain avait réussi à faire plier l'américain Ford qui a fini par annuler son projet d'usine au Mexique d'un montant de 1,6 milliard de dollars. À la place, il investira dans son usine du Michigan.

En forçant la main de Ford et en imposant au constructeur américain d'investir dans son usine du Michigan, Donald Trump crée-t-il de nouveaux emplois aux États-Unis ? Le milliardaire en est persuadé, mais les économistes sont plus sceptiques. Ford devrait investir 700 millions de dollars dans son usine du Michigan. Cela devrait toutefois avoir un impact très limité sur l'emploi.

« Ford pourrait créer 700 emplois sur le sol américain avec cet investissement. 700 emplois, à l'échelle des États-Unis, ce n'est pas grand-chose, explique Thomas Julien, spécialiste des États-Unis pour la banque Natixis. Cela fait extrêmement bien en termes d'effet d'annonce et ça cadre parfaitement avec les promesses de campagne, mais a priori, la production qui sera rapatriée aux États-Unis est plutôt susceptible d'être plus fortement automatisée donc elle ne créerait pas forcément de nouveaux emplois ».

Des décisions sur le long terme

Sans compter que la décision de Ford aurait été prise à l'automne dernier. Trump n'y serait donc pour rien. « Les décisions dans l'automobile sont des décisions qui se prennent sur le long terme avec des études. On pèse un certain nombre d'éléments, on prend rarement une décision par rapport à un tweet, affirme Bertrand Rakoto, analyste indépendant du marché automobile à Détroit. La stratégie de Ford est celle d'un constructeur qui doit diversifier ses lots de production, qui doit pouvoir équilibrer ses différentes productions entre différentes usines et différents sites, à l'outillage de ces usines, à l'âge de ces usines et aux zones de diffusion des véhicules. »

De la même façon, le président élu s'est réjoui de la création de 50 000 emplois par le groupe japonais Softbank. Mais selon les analystes, il s'agit avant tout d'un investissement de quelque 50 milliards de dollars que le groupe nippon avait de toute façon prévu de faire aux États-Unis, peu importe le résultat de la présidentielle.

La méthode de Trump serait donc avant tout de s'attaquer sur Twitter aux entreprises qui veulent quitter les États-Unis pour produire moins cher ailleurs, et de crier victoire lorsqu'elles changent d'avis, peu importe pour quelle raison. Début décembre, le milliardaire avait annoncé en grande pompe avoir négocié avec le fabricant de climatiseurs Carrier la sauvegarde de 1 100 emplois à Indianapolis. Mais ce chiffre est faux. Il s'agit plutôt de 800 postes sauvegardés.

Des effets d'annonce

Au-delà des chiffres, un problème se pose. Toutes ces décisions de relocaliser la production aux États-Unis pourraient s'avérer à long terme difficilement tenables pour les entreprises. « Forcer les entreprises ou les inciter à revenir sur le territoire américain peut impacter leur production et le coût de vente final du produit, avertit Thomas Julien. Leur modèle actuel de production pourrait nécessiter des changements. »

Pour Bertrand Rakoto, il s'agit avant tout d'effets d'annonce. « Aujourd'hui, les décisions qui sont prises par les différentes entreprises sont : soi un peu attentistes pour voir quelles directions économiques vont être prises, soit des décisions qui sont déjà prises par rapport à d'autres critères. Mais ce n'est, en général, pas par rapport à des réflexions envoyées sur Twitter ou des remarques pouvant être faites au niveau médiatique », affirme-t-il.

L'économie américaine a créé en décembre dernier près de 300.000 emplois. Avec un taux de chômage de 5%, le marché du travail américain est actuellement proche du plein emploi. Pourtant 8 millions de personnes n'ont toujours pas de travail. Les tweets du président élu ne devraient pas résoudre cette équation. Les entreprises américaines, elles, attendent l'investiture de Donald Trump, le 20 janvier prochain, pour connaître la véritable politique économique du nouveau président avant de s'engager.

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