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L’INDUSTRIE DU TRUST EN PLEINE MUTATION

25.09.2017 - 12:57
L’activité de trustee n’est pas nouvelle en Suisse et a connu un premier essor dans les années septante avec le développement de la clientèle anglo-saxonne au sein des banques privées suisses et internationales. Cette tendance s’est amplifiée au début des années deux mille avec l’arrivée de nouveaux entrants, notamment des sociétés spécialisées dans le trust en provenance des îles anglo-normandes. Ces acteurs étaient à la recherche de nouveaux marchés et, pour certains d’entre eux, d’un cadre règlementaire et fiscale moins exigeant que dans leurs juridictions d’origine.   Par Xavier Isaac, CEO de Accuro

L’activité de trustee n’est pas nouvelle en Suisse et a connu un premier essor dans les années septante avec le développement de la clientèle anglo-saxonne au sein des banques privées suisses et internationales. Cette tendance s’est amplifiée au début des années deux mille avec l’arrivée de nouveaux entrants, notamment des sociétés spécialisées dans le trust en provenance des îles anglo-normandes. Ces acteurs étaient à la recherche de nouveaux marchés et, pour certains d’entre eux, d’un cadre règlementaire et fiscale moins exigeant que dans leurs juridictions d’origine.

La ratification par la Suisse en 2007 de la Convention de La Haye sur la reconnaissance des trusts, suivie de l’introduction la même année de la Circulaire sur le traitement fiscal des trusts en Suisse, ont également joué un rôle déterminant dans le développement de l’industrie. Elles confèrent à la Suisse une crédibilité accrue dans le monde compétitif du trust et offrent une sécurité juridique et fiscale pour les familles qui choisissent un trustee basé en Suisse pour effectuer la gestion de leurs trusts patrimoniaux.

Ces évolutions successives ont amené une panoplie de professionnels divers et variés, opportunistes ou stratégiques, à s’investir dans un secteur donnant des perspectives de croissance intéressantes, une fidélisation de la clientèle et une annuité de revenus. Filiales « trust » de banques privées, gestionnaires de fortune, avocats spécialisés en structuration patrimoniale, sociétés de trust indépendantes, constituent dès lors le paysage d’une économie discrète et extrêmement fragmentée en Suisse.

À ce stade, il est important de rappeler qu’agir en tant que trustee est gratifiant à de nombreux égards mais reste une activité fiduciaire à hauts risques. En tant que propriétaire juridique des actifs qui lui sont confiés par le constituant du trust, le trustee est responsable de tous les actes qu’il entreprend en sa capacité de trustee vis-à-vis des tiers et des bénéficiaires du trust.

Il doit avoir une compréhension approfondie de son rôle, de ses obligations et des standards de diligence qui lui sont applicables, en particulier dans le cadre de l’administration et la protection des avoirs du trust. Il faut également souligner que les sociétés de trust doivent se conformer aux lois anti-blanchiment applicables aux intermédiaires financiers opérant en Suisse. Néanmoins, l’accès à la profession de trustee n’est soumis à aucune autorisation préalable par le régulateur à cette époque.

La crise financière amorcée en 2008, l’érosion du secret bancaire dès 2009, l’introduction constante de nouvelles règlementations anti blanchiment et en matière de transparence fiscale avec l’introduction des programmes « FATCA » et plus récemment « CRS », ont graduellement transformé de manière durable notre industrie du trust en Suisse.

Tout d’abord, la grande majorité des banques a pris conscience des risques opérationnels et réputationnels liés à l’activité de trustee. Certains litiges, relatifs notamment à des investissements non performants dans des produits « maison », ont mis à jour l’existence de conflits d’intérêts réels d’un modèle d’affaire « captif », lorsque la banque et la société de trust sont détenues par un actionnaire commun. Les banques en ont, pour nombre d’entre elles, tiré les conséquences en vendant leurs activités de trust en Suisse et à l’étranger.

Beaucoup de professionnels non-institutionnels, ayant peu de collaborateurs ou agissant à titre personnel comme trustee, ont quant à eux pris conscience de la spécialisation rapide du secteur et de l’exigence d’avoir une taille critique. Une équipe professionnelle étoffée est aujourd’hui nécessaire non seulement pour gérer la relation client et l’administration des trusts, mais également pour disposer d’une infrastructure couvrant entre autres les aspects comptables, juridiques et fiscaux, le reporting, la surveillance prudentielle des portefeuilles et autres actifs sous gestion, le risque et la compliance, les systèmes informatiques ainsi que la cyber-sécurité.

C’est donc face à une industrie fragmentée et en recomposition que nous nous trouvons aujourd’hui. L’opportunité de consolidation a bien été comprise par les investisseurs Private Equity qui ont investi massivement ces cinq dernières années dans le secteur. La stratégie s’opère en trois temps : acquisition d’un acteur multi-juridictionnel important dont le siège se situe souvent dans les îles anglo-normandes, suivie d’une succession d’acquisitions rapides et de rationalisation des coûts, pour effectuer ensuite une plus-value sur cession par IPO ou vente à un « trade buyer » dans un délai généralement de trois à cinq ans. De nombreuses sociétés de trust en Suisse ont été embarquées dans ce type de transaction avec des fortunes diverses.

Enfin, la prise de conscience par la FINMA de la nécessité de soumettre les trustees au projet de loi du Conseil Fédéral sur les établissements financiers contribuera à l’accélération de cette tendance dans les deux prochaines années. En effet, la loi entrera en vigueur dès 2018 et prévoit un système d’autorisation préalable, lié à des conditions strictes en matière d’organisation interne, de contrôle des risques, de qualification professionnelle des collaborateurs, de capital minimum et d’assurance professionnelle.

Pour utiliser un terme au goût du jour, la consolidation de l’industrie du trust est en marche ! Il nous faut nous y préparer et en saisir les opportunités, en tant que client, banquier, avocat, gérant indépendant et bien entendu trustee.

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